Témoignage de Jean-Michel Chassany

« Alors que l’école est érigée en établissement public en 1977 et qu’elle prépare activement son installation dans ses nouveaux locaux stéphanois, Pol Pot devient premier ministre du Cambodge. Mais quel est le lien entre cette évolution administrative franco-française et l’histoire du Cambodge ?

Le sort individuel d’un auditeur étranger de l’école et de sa famille : EAV Peng Hak qui, en sa qualité de directeur-adjoint de la sécurité sociale cambodgienne, se trouvait à étudier en France lorsque le régime a été renversé et, avec lui, supprimé tout système de sécurité sociale jusqu’en 1979. La situation politique était telle au Cambodge qu’une fois le cycle d’étude terminé le retour de M. EAV s’avérait impossible. La direction de l’école lui proposa, alors, d’intégrer son équipe administrative qui, à la faveur de la délocalisation, avait besoin d’être renforcée. C’est ainsi que M. EAV exerça la fonction d’adjoint au service des concours avant d’en prendre plus tard la responsabilité pour, ensuite devenir maître-assistant à la direction des études et des stages. Mais M.EAV vivait un drame personnel, le régime de Pol Pot était génocidaire et, pendant de longs mois, il n’eut aucune nouvelle de son épouse et de ses enfants ; craignant de ne jamais pouvoir les retrouver. Finalement après plusieurs mois d’internement son épouse, Sing Hu, fut libérée, elle perdit l’un de ses enfants dans cette période dramatique. L’école, en soutien des démarches entreprises par son mari, contribua au rapatriement d’une partie de la famille en France. Les nouveaux locaux stéphanois étaient dotés d’une conciergerie, la famille se vit proposer de s’y installer et Mme EAV prit en charge également le service de cafétaria. C’est ainsi que pendant plusieurs décennies, la grande histoire rejoignant la petite, ce couple a contribué au fonctionnement quotidien de l’école et à sa vocation d’accueil de ses élèves et stagiaires ; eux aussi vivant une expérience ô combien plus paisible d’ « expatriation ». ».